Pocket Jeunesse
Traduit de l'Anglais par Guillaume Fournier
432 pages
Inutile de présenter l'intrigue de Uglies, le tome 1 de la série écrite par Scott Westerfeld. Aussi connue que Twilight, cette série est un phénomène dans l'univers de la littérature jeunesse. Curieuse, je me devais donc de lire ce roman. Mais, chers lecteurs et lectrices, vous allez être déçus. En lisant les avis de la blogosphère, Uglies jouit d'un grand prestige, considéré comme un excellent roman de jeunesse. Je dois d'ailleurs bien avouer que l'intrigue est passionnante, bien recherchée et forte en actions. Mais justement l'action prend le pas sur la réflexion. L'auteur nous propose une idéologie qui reste en suspens, je dirais qu'il fait appel à l'intelligence de ses lecteurs au lieu de livrer une réflexion aboutie. La philosophie est subtile, l'auteur nous livre par bribes, des informations qui permettent de mieux saisir une société fondée sur l'apparence et le danger qu'elle suscite. C'est bien trouvé, cependant, le début est long, l'intrigue tarde à se mettre en place, la description reste trop sobre pour bien imaginer le cadre. Ce n'est que vers le milieu du roman que je me suis régalée.
D'une manière générale, j'ai moins aimé Uglies, en tant que roman d'anticipation par rapport à La déclaration d'Anna de Gemma Malley. Les deux romans sont proches pour leur genre: la science-fiction ou roman d'anticipation qui nous propulse dans un monde où l'uniformisation des esprits tend à discriminer une partie de l'humanité. Dans La déclaration, ce sont les jeunes orphelins que l'on rejette. Une société qui anoblit la vieillesse et refuse la jeunesse. Dans Uglies, seuls les beaux ont une valeur estimable. Dans une société où seule l'apparence compte, les moches n'ont pas leur place. Uniformisation des esprits, discipline du corps, culte de la beauté, cette société superficielle vit pour le regard que l'on porte sur les autres. Un regard déformé car la réalité n'est qu'artificielle, bafouée par des codes où seul le physique s'affirme. Aucune difformité, aucun défaut physique n'est toléré et les adolescents Uglies ne vivent que dans l'excitation d'être opérés. Passés au bistouri, leur apparence est magnifique et ils peuvent s'afficher au grand jour, participer à des fêtes, s'amuser et vivre une vie de luxe. Mais certains se rebellent, fuient cette manipulation des mentalités et se cachent en périphérie de la ville. Une communauté, loin de toute utopie de la perfection, nommée La Fumée, affectionne la liberté, le libre-arbitre, le choix et la notion de responsabilité. Notre héroïne, Tally, y apprendra le secret de toutes ces opérations génétiques: rendre la beauté au profit de l'intelligence en aliénant le cerveau humain afin que les esprits ne puissent pas réfléchir à cette utopie qui n'est qu'une vaste illusion. En cela, le roman devient un roman d'apprentissage, celui du choix et de l'identité. Tally va devoir choisir entre son amie, son nouvel amour et son désir d'être belle. Un choix difficile s'il en est, essentiel à sa survie. Se faire opérer pour être belle au risque de perdre sa personnalité ou combattre l'impensable telle est la question récurrente de sa recherche d'identité.
Uglies pose ainsi les traits captivants d'une société qui abolit l'éthique et valorise l'esthétique. Une société qui a crée une philosophie où l'anatomie n'est plus une affaire privée et intime mais l'apanage du beau. Le culte de l'apparence est superbement mis en évidence mais dès lors comment s'affirmer en tant qu'être humain dans un monde où l'unique règle est l'identique ?