LUMEN
Traduit de l'anglais par Diane Durocher
Paru en Janvier 2016
430 pages
15 euros
Roman ados dès 14 ans
Thèmes : Dystopie, Mémoire, Société
Quatrième de couverture : Imaginez un monde où votre avenir a déjà été fixé... par votre futur moi ! Callie vient d'avoir dix-sept ans et, comme tous ses camarades de classe, attend avec impatience le précieux "souvenir", envoyé par son moi futur, qui l'aidera à se glisser dans la peau de la femme qu'elle est-destinée à devenir. Athlète de haut niveau… Scientifique de renom... Politique de premier plan... Ou, dans le cas de Callie, tueuse. Car dans son rêve, elle se voit assassiner Jessa, sa jeune soeur adorée... qu'elle passe pourtant ses journées à protéger des autorités, car l'enfant a le pouvoir caché de prédire l'avenir proche ! Avant même de comprendre ce qui lui arrive, Callie est arrêtée et internée dans les Limbes - une prison réservée à tous ceux qui sont destinés à enfreindre la loi. Avec l'aide inattendue de Logan, un vieil ami qui a cessé, cinq ans auparavant, de lui parler du jour au lendemain, elle va tenter de déclencher une série d'événements capables d'altérer son destin. Lorsque l'avenir semble tout tracé, le combat est-il perdu d'avance ? Dans la veine de Minority Report, Forget Tomorrow est le premier tome d'une dystopie haletante, dont l'héroïne va devoir trouver un moyen infaillible de protéger sa soeur de la plus grande des menaces : elle-même...
Dès les premières pages de Forget Tomorrow, j'ai été séduite par l'univers et les idées proposées par l'auteur. Si certaines scènes sont similaires à d'autres romans du genre dystopique : Le Passeur de Loïs Lowry, Promise d'Ally Condie et Divergent Tome 1...les idées sont neuves et originales. Ici la Société est régie par l'Asof et l'Asep, l'une est politique et s'assure que les citoyens respectent les règles, l'autre est sa milice. Mais ce qui nous importe le plus dans le thème de Forget Tomorrow c'est notre héroïne Callie. A la veille de ses 17 ans, elle est anxieuse, à la fois excitée et nerveuse de recevoir son souvenir. Chaque habitant, à 17 ans, reçoit un souvenir de son futur et c'est ce qui va déterminer son destin, conditionner la suite de son parcours. Elle rêve d'être une grande cuisinière. Mais lorsque son souvenir lui est communiqué, toute sa vie est chamboulée. Elle se voit dans un avenir proche tuer sa soeur. Ce geste est impensable, inimaginable car Callie adore Jessa et n'a de cesse que de la protéger de l'Asof. Jessa possède des dons particuliers et si l'Asof l'apprenait, elle serait en danger. Le but de l'Asof étant que les souvenirs du futur se réalisent à tout prix (même les actes horribles, les meurtres et les viols), dès réception de son souvenir, l'alerte est déclenchée et Callie est considérée comme une criminelle. Progressivement on découvre l'horreur qui se cache d'une telle organisation dont les projets, finalement n'est pas de sauver des vies ou de détourner les souvenirs mais au contraire, d'enfermer les auteurs de ces actes pour faire en sorte que ça se réalise. Aidée par Logan, son grand amour, Callie va devoir s'enfuir et rencontrer la résistance...
Même si le schéma du roman dystopique est classique (présentation de l'héroïne, des enjeux, de la société, élément perturbateur, fuite, rencontre de la résistance et combat), les thèmes de Forget Tomorrow sont très intéressants et passionnants car il y a une véritable réflexion à la fois philosophique et existentielle : est-ce que notre destin est constitué d'avance ? est-ce que nos souvenirs, nos rêves peuvent influencer nos choix ? Si on connaissait d'avance nos actes futurs, pourraient-ont les changer ? Peut-on commettre l'irréparable malgré soi, même si c'est contraire à ce que l'on est, à qui on est, à qui on aime ? Derrière le déterminisme de l'intrigue, Pintip Dunn nous parle de libre arbitre et de notion de responsabilité. Les personnages sont attachants et bien campés mais j'ai surtout adoré le déroulement de l'intrigue, savamment dosée entre révélations et actions. A l'intérieur des Limbes, Callie mène l'enquête et fait de terribles découvertes qui dépassent l'entendement au nom d'une pseudo-science ou pseudo-politique d'intégration. Ainsi ce n'est pas tellement le contenu qui m'a le plus surprise car les enchaînements ressemblent à d'autres romans du genre, certaines scènes sont prévisibles ; c'est surtout le fond, entre mémoire manipulée/manipulable, création des souvenirs, réflexions sur l'être humain, la notion de déterminisme social qui est excellent. C'est prenant et addictif. Lorsqu'on touche aux souvenirs, on touche à une partie de soi, à la notion de famille, de liens, d'amour et certains propos sont en ce sens terriblement réalistes, déchirants, criants d'émotions. Vous l'aurez compris, même si j'ai vu venir certaines scènes, les rebondissements et révélations faites par l'auteur sont surprenantes. J'ai beaucoup, beaucoup aimé.