Anne Carrière
Traduit de l'anglais par Marie de Prémonville
Novembre 2017
250 pages
19 euros
Roman ados dès 13 ans
Thèmes : Fantasy, Sorcières, Pouvoirs
Quatrième de couverture : Chaque année, les habitants du Protectorat abandonnent un bébé en sacrifice à la redoutée sorcière des bois. Ils espèrent ainsi détourner sa colère de leur ville prospère. Chaque année, Xan, la sorcière des bois, se voit contrainte de sauver le bébé que les fous du Protectorat abandonnent sans qu'elle ait jamais compris pourquoi. Elle s'emploie à faire adopter ces enfants par des familles accueillantes dans les royaumes voisins.
Mais cette année, le bébé est différent des autres : la petite a un lien étrange avec la lune et un potentiel magique sans précédent. Contre son gré, Xan se voit obligée de la ramener chez elle et de persuader ses amis réticents - un monstre du marais grincheux aussi vieux que le monde et un dragon nain à qui personne n'ose révéler qu'il ne grandira jamais - d'élever cette étrange, attachante et très turbulente petite fille. Ils la baptiseront Luna et ne tarderont pas à en devenir gâteux. Xan a trouvé comment contenir la magie qui grandit à l'intérieur de l'enfant, mais bientôt approche son treizième anniversaire, et ses pouvoirs vont se révéler...
Outre la magnifique et splendide couverture de ce roman jeunesse, La fille qui avait bu la Lune est un conte irrésistible et plein de charme qui va vous emporter aux côtés de personnages inoubliables dont la sorcière Xan. Dès le premier chapitre, j'ai été conquise par la plume enchanteresse de l'auteure qui nous embarque dans une histoire peu commune, entre magie, tendresse, poésie et aventures. J'ai adoré le premier chapitre justement parce qu'il nous met dans l'ambiance, assez mystérieuse et pleine de suspense qui nous incite à tourner les pages. Le récit est fluide, bien que lent, et les éléments magiques portent l'ensemble dans des décors de fantasy médiévale. Un village, une légende, un malentendu et des bois profonds dans lesquels se cachent une sorcière. Les habitants du Protectorat font une offrande par an à la Sorcière des bois pour assurer leur survie. Il s'agit de temps austères, sombres et les superstitions sont ancrées dans les mémoires.
Gherland le grand Ancien est à l'origine de ce sacrifice annuel. Cette année, il est accompagné par son neveu Antain qui ne rejoint pas du tout les pensées des Anciens. Pour lui les habitants devraient se battre pour protéger leurs bébés. L'offrande exigée chaque année est de livrer un nouveau-né à l'orée de la forêt pour la Sorcière des bois... Mais les sorcières existent-elles ? Que font-elles des bébés ? Seulement voilà, Xan est une sorcière bienveillante et elle ne comprend pas pourquoi chaque année, à la même période, elle trouve un enfant humain abandonné. Elle le récupère et se charge de lui trouver une famille aimante qui s'en occupera. Mais cette année est spéciale et Xan tombe sur Luna qui a un potentiel magique relié à la Lune...
La connexion des personnages est parfaitement maîtrisée car l'histoire va suivre un enchaînement logique où chacun a un rôle à jouer : de Xan qui va élever et voir grandir Luna, Antain qui va petit à petit essayer de détruire le cercle des Anciens et la cruauté de son oncle, jusqu'à la mère biologique de Luna qui a encore son rôle à jouer dans l'apprentissage des pouvoirs magiques de sa fille. Luna est une enfant spontanée et on aime la voir grandir, la voir découvrir le monde qui l'entoure. Puis à 13 ans, ses pouvoirs vont se révéler sous l'oeil attentif de drôles de créatures que sont Glerk le monstre du marais et Fyrian le dragon enormus. Puis bien sûr il y a la gentille et compréhensive Xan qui est une sorcière admirable.
La qualité du récit tient à son lyrisme magique... tous les détails sont faits pour nous envoûter dans une jolie ambiance qui fonctionne. Ne cherchez pas ici l'action et les rebondissements, tout est magique et enchanteur dans les descriptions des pouvoirs lunaires de Luna, dans l'attention portée par Xan, par les décors accrocheurs d'une forêt palpitante. J'ai beaucoup apprécié l'originalité de l'intrigue qui est extrêmement habile et met en place tous les éléments dans la première partie du roman et tout s'éclaircit dans la deuxième partie alors que le lecteur avait les clés en main. J'aime bien aussi le message qui est sous-jacent et universel : le traitement de la différence, la marginalisation, le regard qu'on porte sur l'Autre et comment combattre des idées fausses, mettre à bas une organisation autoritaire fondée sur l'obscurantisme. On trouve donc de jolies choses dans La fille qui avait bu la lune et des idées plus philosophiques et existentielles. En tout cas j'ai été littéralement et agréablement emportée par l'atmosphère particulière, à la fois douce et féérique de ce petit bout de roman jeunesse. A découvrir absolument !