Image

Image

Bienvenue

Sous le feuillage est un webzine spécialisé en littérature de jeunesse (mais vous y trouverez aussi de nombreux avis sur la littérature pour adultes) né en avril 2008. Pour vous parler de mes coups de coeur, partager ma passion pour cette littérature si vivante et productive. Il s'agit d'un blog à l'image de ma passion pour la littérature de jeunesse : simple, engagée, enthousiaste.
Pour découvrir, rêver, vibrer, s'évader et s'amuser...
Depuis 2014, en tant que maman, je vous parle de mes découvertes en matière de jeux, jouets, activités et loisirs créatifs que je partage avec mes fils.
Mes genres : fantasy/ fantastique, romance, young adult, thriller, historique et contemporain.

Merci à vous et bonne visite...

Les Larmes de l'Assassin - Anne-Laure Bondoux

2
Bayard Jeunesse - Collection Millézime

Editions Bayard Jeunesse
Collection Millézime
A partir de 13 ans
Prix Sorcières 2004


« Un roman magnifique sur l’innocence et le mal, à travers le destin de trois personnages en quête de leur vérité. »



La ferme des Poloverdo au sud du Chili. Paolo prévient ses parents de l’arrivée d’un étranger. C’est Angel Allegria. Le petit Paolo ne se doute pas…Lorsqu’il rentre chez lui et qu’il découvre les corps inertes de ses parents, il comprend. Angel les a tué d’un geste brusque et sans pitié. Angel est un assassin, un escroc activement recherché par la police locale. Puis vient cette conversation, pour le moins troublante :

« -Quel âge as-tu ? demanda Angel.
-Je ne sais pas.
-Sais-tu faire la soupe ?
L’homme avait beau serrer le manche de son couteau, il n’arrivait pas à se décider. L’enfant, très petit, très sale, très mouillé, se tenait là, devant lui, et il ne parvenait pas à s’imaginer mettre fin à sa vie. Un sursaut inattendu de sa conscience, peut être un peu de pitié, retenait son bras.
-Je n’ai jamais tué d’enfant, dit-il.
-Moi non plus, répondit Paolo.
Cette réponse arracha un sourire à Angel.
-Sais-tu faire la soupe, oui ou non ?
-Je crois que oui.
-Fais-moi de la soupe, alors. »
C’est alors qu’une relation toute particulière débute entre l’enfant et le tueur…

Ce roman relate la relation qui se noue entre l’innocence d’un enfant et le mal auquel il doit sa condition d’orphelin. C’est cette relation inattendue, à la fois forte et austère que l’on suit. Ici c’est la progression de l’histoire plus que son issue qui nous importe. Cette affection qui se tisse maladroitement entre l’enfant et l’assassin est déroutante. Puis intervient un troisième personnage, Luis, qui prend Paolo sous « son aile » en lui faisant découvrir ses goûts. La lecture, la musique et l’art rendent l’enfant heureux ou du moins lui permettent de s’évader. Angel est jaloux et craint que Paolo se détourne de lui. Une rivalité sous-jacente, présente dès leur première rencontre, naît entre les deux hommes pour l’amour de l’enfant. Ce trio est étonnant et émouvant.


Le personnage d’Angel (dont la traduction du nom est loin d’évoquer celle d’un tueur, laisse déjà présager son repentir !) à la personnalité nuancée, aux sentiments confus et tout en retenue est imprévisible. Il prend conscience de ses actes et surtout celui d’avoir tué la famille de Paolo, car sans cela il n’aurait pas cette relation si spéciale avec l’enfant. (Je sais c’est assez contradictoire mais c’est là toute la beauté du roman !) Anxieux, réagissant comme un père, il se plonge dans l’introspection et la remise en cause de son passé.

Bien que le roman commence de manière brutale (dès le premier chapitre, c’est violent et dur !) comme pour mieux nous montrer le choc de Paolo et la violence gratuite d’Angel ; il n’y a pas de parti pris. Ce n’est pas le bien qui lutte contre le mal mais plutôt la cohabitation fortuite des deux. Il n’y a pas de choix pour Paolo. Cette histoire est triste, sombre et tout ceci rend perplexe. L’assassin qui veut l’affection de l’enfant alors qu’il a tué ses parents est franchement déconcertante voire malsaine.

Il faut faire preuve d’une grande tolérance. Comment ne pas se laisser emporter par la colère, la révolte et la vengeance ? (Vous me direz sans doute que Paolo est bien trop jeune pour se défendre !) C’est vrai. Et ceci en dit long sur Paolo, un enfant courageux, forcé de grandir malgré lui et dont l’acte de pardon est insondable. C’est puissant. Alors que ce drame suscite des réactions plus ou moins violentes, le ton calme et étrangement serein qui en ressort est émouvant. Il fait naître des sentiments contradictoires autour d’une réflexion sur la rédemption et les erreurs du passé… Ce livre est à conseiller mais je m’inquiète pour les âmes sensibles. L’histoire est dure et demande une maturité certaine.

A la fin des « Larmes de l’Assassin » (pour ma part) : un grand silence, un instant de déprime profonde puis du respect pour l’auteur.
Sous le feuillage | Design par Catherine Surr