Bayard Jeunesse
Traduit de l'anglais par Jean-Luc Defromont
Février 2017
375 pages
15,90 euros
Roman ados dès 14 ans
Thèmes : Société, Technologie, Portable
Quatrième de couverture : Amérique : Fiona vit à Vancouver. Après une fête arrosée, elle envoie à son petit ami un selfie dénudé qu'elle pourrait bientôt regretter... car là où le téléphone portable est roi, les lois de la réputation sont impitoyables. Afrique : Sylvie a fui le Congo avec sa famille. Son père a été tué dans le conflit autour du coltan, le minerai qui sert à la fabrication des téléphones portables. Dans un camp en Tanzanie, l'avenir des siens repose désormais sur ses épaules : doit-elle se marier ? Ou tenter de fuir ? Chine : Laiping débarque dans la grande ville de Shenzen. Venue de la campagne, elle rêve de travailler dans une usine de fabrication de téléphones. Mais la réalité est tout autre : le travail est épuisant, et Laiping va vite apprendre qu'il vaut mieux ne pas protester...
Ce qui m'a attiré en premier lieu vers ce roman c'est l'originalité du thème et de la narration : trois adolescentes, trois contextes sociaux différents, trois destins réunis autour d'un téléphone portable, de sa fabrication dans une usine chinoise à la fonction de portable en Amérique, en passant par un de ses composant : le coltan et le marché noir en Afrique. Trois univers distincts aux relations sociales et politiques divergentes : en Amérique, c'est la liberté d'expression et les dérives des technologies qui va être mise en avant avec le harcèlement et l'utilisation d'une photo compromettante. En Chine, le téléphone portable est le moyen de parler d'exploitation ouvrière, de main d'oeuvre bon marché, du travail des mineurs, du harcèlement moral et social. En Afrique, en Tanzanie, c'est la montée des conflits, du régime totalitaire, violent et armé d'un homme qui trafique le minerai servant à la fabrication des téléphones portables. Trois visions, trois jeunes filles dont le récit en alternance démontre que l'outil en soi peut dénoncer bien des dérives et des dangers, même si l'auteure se défend de faire du téléphone portable un outil du diable, loin de là, elle s'en sert surtout comme moyen de réflexion.
Ainsi le lecteur suit le parcours quotidien de Fiona, américaine, victime d'une publication sur réseaux sociaux d'une photo privée qu'elle avait envoyé avec son portable à son ex petit-ami. Laiping, chinoise vient d'être recrutée par une entreprise de fabrication de portables et va découvrir les épouvantables condictions de travail qu'il vaut mieux taire au risque de dangers plus importants. Puis Sylvie qui vit dans un camp en Tanzanie, après avoir fui les violences au Congo et qui voit son frère aîné s'enrôler progressivement mais irrévocablement au sein d'une milice trafiquant le coltan et des armes. Elle espère obtenir l'asile au Canada. Trois pays, trois cultures, trois héroïnes fortes et courageuses qui vont révéler à quel point l'entreprise des téléphones portables coûte en termes d'humanité, de liberté et de respect des droits de l'homme ainsi qu'en termes de relations sociales et de hiérarchie des classes. C'est très bien vu!
J'ai trouvé les propos parfaitement documentés, intelligents, porteurs de réflexion et d'une grande justesse. Je pense que l'auteure a voulu nous faire réfléchir et c'est un pari osé, mais réussi car réellement bien abouti. Tout est lié et étroitement mis en place avec cohérence et réalisme. J'ai beaucoup aimé et c'est un roman assez novateur de ce qu'on lit actuellement.