Editions Hélium
Traduit de l'anglais par Nathalie Peronny
Avril 2018
224 pages
16 euros
Young Adult/ Dystopie dès 14 ans
Thèmes : Deuil, Adolescence, Culpabilité
Grand Prix de l'Imaginaire en 2008
Quatrième de couverture : Angleterre, 2140. Les adultes peuvent choisir de ne plus mourir s'ils renoncent à faire des enfants. Anna vit depuis presque toujours au Foyer de Grange Hall, un pensionnat pour les Surplus, des enfants qui n'auraient pas dû naître, des enfants dont les parents ont défié la loi en les mettant au monde. Anna n'a plus de parents désormais. Confinée dans l'enceinte du pensionnat, elle travaille très dur, pour effacer leur faute. Anna a tout oublié de son passé. Jusqu'au jour où arrive un jeune garçon qui semble la connaître. Mais qui est ce Peter ? Pourquoi ne la laisse-t-il pas tranquille ? Et pourquoi elle, Anna, se sent-elle soudain si troublée ? A travers l'incroyable histoire d'Anna, et au fil de son carnet, son unique confident, un roman bouleversant sur la vitalité de l'adolescence.
"Mon nom est Anna.
Mon nom est Anna et je ne devrais pas exister.
Pourtant, j'existe."
J'ai déjà lu ce roman à sa sortie en 2008 chez Naïve Editions et ce fut un coup de coeur pour la trilogie entière. Les éditions Hélium publient en avril 2018 une réédition de cette trilogie dystopique. Il s'agit d'une saga d'anticipation qui aborde la question de la longévité et de l'espérance de vie à travers l'histoire de la jeune Anna, conçue dans l'illégalité.
Surplus
Anna est une Déléguée hors pair, une recrue consciencieuse et utile, la
meilleure qui puisse exister au pensionnat de Grange Hall. Anna fait
partie de ces enfants nés illégalement, dont les parents ont enfreint la
Déclaration. En 2140, la Longévité n'est plus un rêve mais une réalité,
qui impose une bien sinistre loi : être immortel implique de refuser
d'avoir des enfants. Car si vivre éternellement est miraculeux, la
Longévité s'arroge d'un constat économique dévastateur : la surpopulation
et un manque évident de ressources pour la maintenir. D'un moindre mal
il faut choisir et la Déclaration, cette loi égoïste l'a fait : vivre
éternellement sans enfants.
Autant dire que cela est bien triste : plus
d'enfants, plus de jeunesse, plus de renouvellement. Et, par une étrange
tournure des mentalités et des esprits, il s'avère que les parents qui
décident de donner la vie malgré cette interdiction, deviennent des
criminels et sont haïs non seulement par la société entière mais aussi
par leurs propres enfants. Ces enfants, inévitablement sont retrouvés et
emmenés dans un orphelinat triste, un véritable enfer qui n'est autre
que Grange Hall. Si bien que ces Surplus, ces "indésirables", "surpoids"
ou "boulets" subissent un véritable lavage de cerveau qui les élève
dans la haine de leurs parents. Un enfer : à la moindre erreur aussi
minime soit elle, c'est l'isolement, la violence, les coups et les
propos ravageurs comme un leitmotiv de mort : "tu ne dois pas vivre, tes
parents sont des criminels et égoïstes, tu n'es qu'un misérable Surplus,
tu n'es rien".
Au milieu de toute cette cruauté, voici notre Anna, qui
paie de sa vie pour le crime de ses parents, qu'elle hait plus que tout.
Anna veut être une bonne Déléguée et fait tous les efforts
inimaginables pour plaire à Mrs Pincent, la directrice de Grange Hall.
Mais c'est peine perdue. Elle doit payer sa dette à Mère-Nature et se
dit chaque jour qu'elle ne devrait pas vivre. Quelle triste pensée pour
une adolescente de 15 ans. Mais tous les Surplus ne sont pas comme Anna.
Peter, nouveau venu est énigmatique. Insolent, perturbateur et
affreusement rebelle, il semble renier tout l'enseignement qu'Anna aie
appris. Il refuse de se considérer comme un poids pour la société. Mais
ce n'est pas ce qui dérange et énerve le plus Anna. Peter l'appelle par
son nom de famille et pire lui confie que ses parents la désiraient et
qu'ils l'attendent avec impatience. Les propos de Peter sont
intolérables pour Anna qui n'en supporte davantage. Mais le doute
s'installe et Anna rêve. Et si tout ce qu'il disait était possible ?
Il y a tellement de choses à dire sur ce roman. C'est un vrai coup de coeur, une lecture incroyablement riche en réflexions, en philosophie et en psychologie. C'est vraiment excellent.
Tout d'abord le cadre de l'histoire : Angleterre 2140 nous plonge au
coeur d'un roman d'anticipation et dystopique si réaliste et bien écrit que c'en est
épatant. Ensuite l'intrigue : un choix existentiel. Vivre immortel et
refuser la vie et pour ceux qui donnent la vie clandestinement, refuser ce
droit alors qu'il est présent. Abolir la jeunesse pour anoblir la vieillesse.
C'est le coeur de l'histoire et pourtant le message du livre c'est
l'hymne à la vie, à cette jeunesse qui se renouvelle sans cesse. Passons
aux personnages : fouillés, recherchés. Même Mrs Pincent a ce côté
humain, qui fait qu'on peut la comprendre. Beaucoup d'émotions pour ce
livre : étonnement, introspection, addiction, émotion. A la fin, je suis restée scotchée,
bien qu'en ayant lu le début je me suis retrouvée déboussolée par les
propos d'Anna : "Je ne devrais pas exister". Un paradoxe intéressant :
alors que notre société actuelle repousse la vieillesse, fait l'éternel
louange des bienfaits de la jeunesse, ce roman inverse ce rapport et
place la jeunesse comme un fardeau. D'une originalité inégalée, d'une écriture fluide et prenante, voilà ce qu'il faut retenir de ce roman jeunesse unique, précurseur de bien d'autres que j'ai pu lire depuis!
Un MUST READ du genre Young Adult!